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La crise de la dette stagflationniste est arrivée

NEW YORK – Cela fait maintenant un an que j’explique que la hausse de l'inflation serait persistante, que ses causes incluent non seulement de mauvaises politiques mais aussi des chocs d'offre négatifs, et que la tentative des banques centrales de la combattre provoquerait un atterrissage économique brutal. J’avais averti que, lorsque la récession arriverait, elle serait grave et prolongée, avec des difficultés financières et des crises de la dette généralisées. En dépit de leurs propos agressifs, les banques centrales, prises au piège de la dette, pourraient encore se dégonfler et se contenter d'une inflation supérieure à sa cible. Tout portefeuille d'actions risquées et d'obligations à revenu fixe moins risquées perdra de l'argent sur les obligations, en raison de la hausse de l'inflation et des anticipations d'inflation.

Ces prédictions se sont-elles révélées exactes ? Premièrement, l’équipe « Transitoire » a clairement perdu face à l’équipe « Persistente » dans le débat sur l'inflation. En plus des politiques monétaires, fiscales et de crédit excessivement souples, des chocs d'offre négatifs ont fait exploser la croissance des prix. Les fermetures et blocages liés à la COVID-19 ont entraîné des goulots d'étranglement au niveau de l'offre, y compris concernant la main-d'œuvre. La politique chinoise du "zéro COVID" a créé encore plus de problèmes pour les chaînes d'approvisionnement mondiales. L'invasion de l'Ukraine par la Russie a provoqué une onde de choc sur les marchés de l'énergie et d'autres matières premières. Enfin, le régime élargi de sanctions – sans oublier le renforcement du dollar américain et d'autres devises – ont contribué à balkaniser encore un plus l'économie mondiale, avec les relocalisations (friend-shoring) et les restrictions au commerce et à l'immigration qui accélèrent la tendance à la démondialisation.

Tout le monde reconnaît désormais que ces chocs d'offre négatifs persistants ont contribué à l'inflation. La Banque centrale européenne, la Banque d'Angleterre et la Réserve fédérale américaine ont commencé à admettre qu'un atterrissage en douceur sera extrêmement difficile à réaliser. Le président de la Fed, Jerome Powell, parle désormais d'un "atterrissage à peu près doux", qui ne pourra pas éviter au moins "un peu de douleur". Pendant ce temps, un scénario d'atterrissage brutal devient le consensus des analystes de marché, des économistes et des investisseurs.

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