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Capture budgétaire à la BCE

LONDRES - Depuis le deuxième trimestre 2021, l'inflation au Royaume-Uni, aux États-Unis et dans la zone euro dépasse de loin l'objectif de 2 % fixé par leurs banques centrales. Cette hausse subite pourrait bien s'expliquer par la sévérité et la durée inattendue de la pandémie de COVID-19, les retombées de la guerre de la Russie en Ukraine, ou encore par des erreurs de jugement répétées de la part de la Banque d'Angleterre, de la Réserve fédérale américaine et de la Banque centrale européenne.

Mais il existe autre explication possible : la politique monétaire serait sujette à la dominance budgétaire ou à la capture budgétaire. Si l'on suit cette interprétation, les principales banques centrales se sont engagées dans des politiques agressives de taux d'intérêt bas et d'achats d'avoirs en vue de soutenir les politiques budgetaires expansionnistes de leurs gouvernements, quoiqu'elles aient su que de telles politiques étaient susceptibles d'aller à l'encontre de leur mandat de stabilité des prix et qu'elles n'étaient pas nécessaires pour préserver la stabilité financière.

L'interprétation de la « capture budgétaire » est particulièrement convaincante pour la BCE, qui doit faire face à plusieurs États souverains confrontés à des problèmes de soutenabilité de la dette. La Grèce, l'Italie, le Portugal et l'Espagne sont tous des pays fragiles sur le plan budgétaire. Et la France, la Belgique et Chypre pourraient également faire face à des problèmes de financement souverain quand la prochaine phase descendante du cycle va s'amorcer, ou quand les taux d'intérêt sans risque vont se normaliser après les niveaux extraordinairement bas de la décennie passée, ou quand le risque souverain sera estimé à un prix plus réaliste.

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